97e Régiment d'Infanterie


97e Régiment d'Infanterie alpine

(Division Barbot)



Historique de guerre

(1914 - 1918)




ALSACE 1914
LORRAINE 1914
ARTOIS 1914 - 1915
VERDUN - WÖEVRE 1916
SOMME 1916
COUCY 1916 - 1917
ALSACE 1917
PLESSIS DE ROYE 1918
BOIS DE REIMS 1918
FLANDRES 1918

Alsace 1914

C'était un beau régiment : quatre bataillons, plus de 4000 hommes presque tous savoyards, de ce coin montagneux de France où la race conserve la vigueur du corps et l'énergie de l'âme.
Il s'était mobilisé à Chambéry, il avait veillé un moment à la frontière italienne, rongeant son frein de se voir inemployé, il s'embarquait maintenant et le 16 août arrivait aux environs de Belfort.
Le 97 monte vers le nord ; ses éléments forment une longue colonne d'où partent parfois des cris, des chants joyeux, où règne également parfois le silence au passage d'un soldat blessé ou d'une famille en pleurs. impressions fugitives : le soleil est chaud, l'étape est longue, peu importe, on traverse allègrement les villages, on franchit avec enthousiasme la frontière que marque un poteau renversé. Chacun n'a qu'un désir ; se mesurer avec l'adversaire, et sous les ordres d'un glorieux mutilé de 70, le général Pau, faire flotter nos couleurs en Alsace.
Le 19, le régiment quitte à l'aube de ses cantonnements : Dannemarie, Anspach, Altenach. Les nouvelles sont bonnes : "l'ennemi est en retraite, la 44e division ira cantonner le soir vers Illfurth ou Mulhouse", la marche reprend ; chacun se sent plus alerte et accentue fièrement le pas dans la traversée des bourgades.
Dans le ciel bleu un faucon blanchâtre a surgi, bientôt suivi de plusieurs autres et dans le lointain se succèdent maintenant des détonations affaiblies ; le 4e bataillon de l'avant-garde vient de déboucher de Zillisheim ; devant lui s'étend un plateau qui domine au fond une colline boisée au-dessus du village de Flaxlanden. Les cartouches sont défaites, une formation ouverte est prise rapidement, la marche reprend sans hésitation ; l'émotion a été courte chez ces montagnards énergiques et chacun vite ressaisi désire affronter la lutte au plus tôt.
Maintenant les balles passent en sifflant au-dessus des têtes ; peu nombreuses d'abord. Puis la fusillade devient plus nourrie, plus ajustée et les premiers hommes atteints disparaissent en tombant dans les champs d'avoine. Mais, où est l'ennemi ? Dans les bois sans doute, sûrement même, à la lisière, à 800 mètres. En avant. Il faut le joindre, le forcer à se montrer ; allons ; baïonnette au canon !, en avant !, en avant ! Et l'attaque part contre l'inconnu, contre l'invisible avec le plus bel élan, la plus héroïque folie de sacrifice.
Les soldats tombent, les officiers tombent ; le cri de "en avant" retentit toujours, jusqu'à ce que la vague d'assaut brisée, émiettée, s'affaisse pour ne plus se relever. Le 1er bataillon est venu se déployer la gauche du 4e et lui aussi cherche à atteindre l'ennemi invisible dont le feu est si meurtrier ; chacun de ces bonds cause de nouvelles et terribles hécatombes et il s'arrête enfin quand les trois quarts de son effectif ont fondu dans cette fournaise.
Le 3e bataillon est venu au secours des deux bataillons engagés ; en avant les Alpins ! la musique joue, le clairon sonne la charge et les assauts se succèdent, toujours aussi meurtriers pour les assaillants. Un officier, le sous-lieutenant DINET, est parvenu avec quelques hommes jusqu'aux tranchées allemandes, sur lesquelles il s'écroule tué à bout portant. La lutte cesse, il n'y a plus de bataillon, plus de compagnie, pas même de section. La bravoure de tous à confiner à la folie, folie de l'héroïsme, folie du sacrifice et seuls sur le plateau parmi les avoines, les képis et capottes des morts et des blessés, coquelicots, bleuets dans la moisson jettent des notes riantes, des groupes épars, sans chef pour la plupart, tâchent d'arrêter l'ennemi.
Le 2e bataillon retiré au moment où il allait lui aussi s'engagé (chargé d'établir la liaison à gauche entre les deux régiments de la brigade), était seul à peu près indemne au cours de cette journée qui n'eut pas de lendemain. L'allemand dont la droite avait été enfoncée par le 7e corps, se dérobait dans la nuit et le 20, le 97e recevait l'ordre d'aller s'embarquer en toute hâte à Mortemart, pour une direction inconnue.


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La Lorraine 1914

Il faut tenir.
L'adversaire a la supériorité numérique, il faut tenir ; l'ennemi a des mitrailleuses en masse, il faut tenir ; l'ennemi a une artillerie formidable ; fantassins il faut tenir !
Il faut tenir, c'est-à-dire se dévouer corps et âme, se résigner au sacrifice sans gloire pour pour le salut de tous, aller jusqu'au bout de l'effort, plus loin encore. C'est là votre rôle au cours des journées en Lorraine, à vous enfants de la Savoie, soldats du 97 : tenir et mieux encore refouler l'ennemi.
Les troupes françaises vers Sarrebourg après quelques succès se sont heurtées à de solides positions qu'elles n'ont pu enlever, puis ont dû céder devant le nombre et se replier lentement vers le sud-ouest. Il faut arrêter à tout prix l'avance allemande vers Nancy et la touvée de Charmes, avance si dangereuse pour toute l'immense ligne de nos armées qui converse à l'heure actuelle en retraite, avec Verdun comme pivot, en attendant le moment favorable où elles pourront faire demi-tour et repartir à l'attaque.
Le 25 août, le 97 débarqué la veille près de Bruyères, suis la vallée de la Mortagne, traverse Rambervillers, il s'engage sur la route Raon l'Etape. De longs convois des migrants chassés par l'incendie, par les hordes barbares, défilent en sens inverse. Vengez nous, tuez-les tous ! Ils ont tout pris, tout pillé, tout brûlé. Les coeurs se serrent, les poings se crispent, une froide résolution se lit sur tous les visages.
La colonne a quitté la route Raon l'Etape, elle s'élève au nord, gravit les pentes de la longue arrête aux sommets boisés ; des blessés passent, les artilleurs se replient, la rage et la douleur au coeur, leurs batteries mises en pièces par les 105. La colonne avance toujours.
Elle s'engage dans les bois, s'étale, franchit la crête et les premiers éléments arrivent à la lisière sur le versant opposé. Devant s'étend une pente douce et longue, entièrement découverte : en bas, dans le lointain, le village de Menil, premier objectif assigné.
Les ordres sont rapidement donnés et l'attaque, couverte à droite part le 159e qui marche sur Ste Barbe à l'est du Menil, à gauche par des marsouins en position en avant, dévale la pente. Les petites colonnes sélancent, traversent, d'un bond les espaces découverts, se terrent un moment dans les creux pour reprendre haleine et franchissent ainsi avec fort peu de pertes, malgré les gros obus qui exposent en projetant vers le ciel leurs grosses colonnes de fumée, ou les schrapnels qui éclatent sur les têtes avec un déchirement strident, l'espace qui les sépare du Menil.
Maintenant il est impossible d'avancer davantage sans l'appui de l'artillerie, l'ennemi est  retranché aux abords ou dans le village ; son feu devient par trop meurtrier. Un moment l'espoir a parcouru la ligne d'attaque : nos 75 se sont installés à la lisière des bois à la crête en arrière et règlent leurs tirs sur les défenseurs du Mesnil et de Ste Barbe ; contre-battus aussitôt par des 105 ils se taisent, fortement éprouvés, impuissants dans cette lutte trop inégale : ils abandonnent l'infanterie à son sort. Les tentatives de celle-ci ne peuvent aboutir au résultat cherché ; les 2e et 3e bataillons s'épuisent dans un combat sans espoir ! et la nuit tombe sur le champ de bataille où nous n'avons pu triompher mais où du moins par notre vaillance nous avons contenu l'ennemi.
La lutte se poursuivit durant deux jours : les hommes avaient creusé des trous pour s'abriter, puis ils les avaient réunis par une tranchée. Ainsi organisé le 97, s'il n'a pu sans appui d'artillerie, enlever Menil, brise du moins toutes les tentatives que fait l'adversaire pour en déboucher.
L'ennemi impuissant de ce côté poursuivit cependant son attaque sur d'autres points ; de Raon l'Etape, d'Etival, il pousse avec vigueur les éléments du 21e corps et arrivent sur le sommet boisé qui sépare la vallée de la Meurthe de celle de la Mortagne ; le 27 au soir le 97 reçoit l'ordre d'aller tenir le col de la Chipotte sur la route Raon l'Etape, Rambervillers.
Du 28 août au 10 septembre, le régiment déployé dans les bois, soutient la lutte ; lutte âpre et contre un ennemi invisible. L'étendue du front, la faiblesse des effectifs, la fatigue de tous, l'absence de l'artillerie, ne permettent nul effort sérieux et il faut à tous les combattants une rare énergie pour que les petits groupes épars sur la ligne, presque perdus dans la forêt se cramponnent obstinément au sol et empêchent toute avancée de l'adversaire.
Col de la Chipotte, qui le 1er septembre ne fut sauvé que grâce à l'énergie du général BARBOT, légendaire figure de soldat, et de quelques unités près de lui qu'il lança sans hésiter sur une forte attaque allemande ; col de Baremont, que les 2e et 3e bataillons défendirent avec la fureur du désespoir ; vous êtes peuplés de croix blanches ; le 97 s'y est sacrifié, mais il a tenu.
La bataille de la Marne pendant ce temps, s'achevait en triomphe et sur tout les points l'armée allemande battait en retraite. Le 12, le régiment entamait la poursuite, descendait dans la vallée de la Meurthe puis remontait à la l'est de la frontière. Avant d'atteindre l'arête principale des Vosges, il se heurtait aux retranchements ennemis dont il cherchait vainement à s'emparer.
Il réussit à prendre pied dans le hameau de la Fontenelle au ban de Sapt mais la fatigue, l'épuisement de tous, la diminution des effectifs ne permirent pas sur ce point, comme sur tout le front français, de pousser plus loin l'avantage.
Après quelques luttes sanglantes, les survivants s'installèrent dans des trous creusés à la hâte, et sous la plus battante, sans couverture, sans toiles de tente, sans abri, attendirent stoïquement qu'on les vint relever.
Le 28, la division (97, 159 - 54, 57, 61 bataillons de chasseurs) ce qui sera la 77, mais restera la division Barbot, du nom de son premier chef, est rappelée en toute hâte et transportée vers le nord, vers Arras.


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L'Artois 1914

Le 30 septembre, la division débarquait à Arras, et dans les gares voisines.
Le 97 est réduit à trois bataillons, car les pertes en cadres et en effectifs n'ont pu être comblées malgré l'arrivée de nombreux renforts ; chacun regarde la ville, les cafés, les magasins et escompte les douceurs d'un repos bien gagné.
1er octobre. Alerte ! Alerte ! L'ennemi est en force à Cambrai de grosses masses en débouchent, s'avancent vers l'ouest. La division Barbot leur barrera le passage et couvrira Arras. Le 97 reçoit l'ordre de se porter de suite vers Guemappes et Wancourt, il s'y établira en avant-postes, avec à droite les chasseurs, à gauche le 159. La consigne est de tenir.
Le régiment s'ébranle bientôt ; il fait nuit ; rares sont les cartes, plus rares encore les boussoles. Les bataillons de têtes 1 et 3, s'avancent avec prudence dans l'inconnu. Parvenus aux abords des villages, ils sont accueillis par une vive fusillade.
Ils s'arrêtent, s'organisent non sans de grosses difficultés. Au petit jour ils sont assaillis de toutes parts ; un brouillard épais les enveloppe et rend toute liaison impossible, on résiste sur place, on se défend avec acharnement, mais débordés par le nombre les groupes terriblement éprouvés, en particulier ceux du 2e et 3e bataillon, se replient lentement vers Arras sans cesser de combattre.
Le brouillard s'est levé, la retraite sur ce grand plateau dénudé est des plus difficiles, car maintenant du côté allemand fusils, mitrailleuses crépitent sans relâche et les canons se sont mis de la partie. Plus de la moitié de l'effectif est par terre, tous les officiers supérieurs sont tombés ils restent deux capitaines, et pourtant les derniers survivants des 2e et 3e bataillons sous les ordres du capitaine Bozonnat, du lieutenant Trousset, de l'officier payeur lui-même le lieutenant Mayousse qui, à moitié sourd, est accouru seconder les derniers camarades, s'incrustent sur le sol, font des prodiges d'héroïsme et parviennent à enrayer l'avance ennemie. Le 1er bataillon à gauche, moins fortement pressé, se retire en bon ordre. Faisant front avec une maîtrise parfaite il s'établit à hauteur des débris des deux autres, formant avec eux une ligne qui tiendra jusqu'au soir.
Son chef, le commandant Huberdeau, prend le commandement du régiment réduit à six compagnies. Les pertes ont été des plus lourdes au cours de la journée, il reste 1000 hommes, mais le sacrifice n'est pas vain, Arras n'a pas été atteint par l'ennemi.
Le 159, les chasseurs, ont lutté avec une égale énergie et un pareil esprit de sacrifice, aussi la division Barbot est-elle étirée sur une longue et mince ligne devant la ville, lignes que seul maintient maintenant le dévouement le plus absolu de tous.
Dans la nuit du 8 au 9, le 3e bataillon subissait une nouvelle attaque et se maintenait énergiquement sur ses positions du côté de Roclincourt, seule une compagnie allemande parvenue à pénétrer dans nos lignes, le lieutenant Sandrin à la tête d'une section, se jette au-devant d'elle, l'empêche de progresser et la maintient jusqu'au jour, moment où, après une lutte opiniâtre, cernée de toutes parts, elle acceptera de se rendre.
Le 21, aidé par une artillerie formidable, où les 210 se mêlent aux 77 et aux 105, l'allemand reprend la lutte et tente un dernier effort. La ligne mince sous la trombe de fer, fléchit mais ni ce jour, ni le lendemain 22, elle ne se brise ; Arras était sauvé de l'invasion.
La bataille finie, l'Allemand a reculé son front et chacun s'organise de son côté.
Les tranchées, les boyaux, les abris se creusent ; les hommes surpris d'abord, se met à l'oeuvre avec ardeur, maniant le pique, la pelle ou tendant le fil barbelé.
O Morts de Flaxlanden, tombés dans l'enthousiasme ! Morts du Menil, de la Chipotte, de Baremont, Morts de Wancourt et de Guemappes, tombés dans la foi ardente de l'utilité de votre sacrifice, héros sans nombre et sans nom, vous écrivîtes avec votre sang une des plus belles pages de l'histoire de votre pays, de cette belle France sauvée par votre courage et votre dévouement.


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Artois 1915

L'hiver s'écoule doucement, le 97, si cruellement éprouvé se reconstitue peu à peu ; les bataillons, réduits à 2 compagnies sont renforcés, remis à 3, puis à 4 ; des compagnies de mitrailleuses, nouvellement créées, leur sont adjointes ; le régiment forme, au début du printemps, une unité splendide à laquelle l'âme des Morts, l'énergie des survivants, l'enthousiasme des nouveaux venus promettent les plus beaux succès. - Un nouveau chef, le colonel de Combarieu, a pris le commandement qu'il exerce avec autant de science que de bienveillante autorité, il est adoré de tous. _
A la fin de l'hiver, après 2 ou 3 petits glissements dans des secteurs voisins, le 97 est installés entre Carency et le bois de Berthonval, en face de Souchez.
Dans cette région va se déclencher l'offensive décidée par le commandement ; les meilleures troupes : "20e 21e corps, division marocaine, 70e 77e divisions" auront l'honneur d'enfoncer la muraille allemande, de créer la percée où les réserves se lanceront ensuite, pour tomber sur les derrières de l'ennemi.
Grandiose vision qui remplit tous les coeurs d'enthousiasme et d'espérance. On travaille avec acharnement ; artilleurs, fantassins durant tout le mois d'avril, préparent le terrain d'attaque, s'entraînent pour le futur assaut.
Le 9 mai, l'heure a sonné. Le soleil se lève radieux, le ciel est pur, un calme absolu règne sur la plaine. Soudain résonne un bruit de tonnerre qui augmente et qui ne cesse plus ; notre artillerie vient d'entrer en action ; il est 6 heures -- 75, 155, mortiers de 210 crachent sans arrêt, les obus passent avec un sifflement strident, ou avec un ronflement sonore au-dessus des têtes, vont exploser dans les tranchées adverses, et dans le ciel, les hommes regardent monter et descendre les torpilles de 58. --
Les coups se précipitent, les unités sont prêtes ; à 10 heures elles s'élancent avec le plus grand ordre et la plus belle ardeur. Les 1er et 2e bataillons du régiment sont en tête, rien ne peut arrêter leur élan. La première ligne allemande est atteinte, puis la deuxième, l'assaut continue toujours. L'ouvrage Oméga est enlevé par la 1ère compagnie qui pousse plus loin, pénètre dans le cimetière de Souchez ; les 3e et 4e sont aux lisières du village ; d'autres ont atteint le Cabaret Rouge, objectif assigné, devant elles, l'allemand est en dérouté, il fuit de toutes parts ; c'est la victoire et la trouée.
Nos canons se sont tus, les réserves sont loin. Dans cet assaut d'une heure au cours duquel le 97 a enlevé plus de 3 km de terrain, les unités ont éprouvé bien des pertes, se sont fortement mélangées, la plupart des chefs sont tombés. Le bataillon de soutien, le 3e à combler les vides de la ligne d'attaque ; chacun, radieux mais épuisé par cette course et par la lutte, attend impatiemment les renforts pour entamer la poursuite.
Les réserves sont loin, maintenant les balles sifflent, plus nombreuses, les obus tombent sur les assaillants. -- A droite le 159 violemment contre-attaqué reflue vers l'arrière et de la cote 119 qu'il vient de reconquérir l'allemand mitraille la plaine.
Le cimetière de Souchez devient intenable sous les obus et ses défenseurs ce replient sur le Cabaret Rouge. Le lieutenant Humbert, le dernier dans ce coin, témoin de sa vaillance, tombe grièvement blessé.
Le soir arrive, l'allemand s'est ressaisi et se prépare à régir furieusement contre ceux qui l'ont si fort malmené et qui maintenant dans la nuit travaillent fiévreusement à organiser leurs conquêtes.
Durant les jours suivants, les 10, 11, 12, incessant fut le bombardement par obus de tous et surtout de gros calibres, incessantes aussi furent les contre-attaques. A peine abrités dans des trous peu profonds et creusés à la hâte, les braves se maintiennent désespérément, malgré les pertes repoussent tous les assauts.
Le sous-lieutenant Pelle, au Cabaret Rouge, debout revolver au poing est l'âme de la résistance ; les mitrailleuses de la 1ère CM, malgré le feu intense d'artillerie adverse qui s'acharne sur elles arrêttent toutes attaques venant de Givenchy. La chaleur est lourde, la fièvre mine les combattants sur ce plateau dénudé, pas une goutte d'eau pour rafraîchir les lèvres ; les ravitaillements n'arrivent pas.
Des officiers, des hommes tombent, nombreux ; Sandrin, l'héroïque lieutenant se jette au-devant des grenadiers ennemis qui progressent par un boyau, quand une balle l'atteint au front. Le lieutenant Grimaut, mortellement frappé, sourit doucement à ses hommes et le soldat Derize ne veut pas, malgré d'atroces souffrances, laisser échapper un cri pour ne pas effrayer les Copains.
Barbot, lui-même, l'héroïque soldat, celui qu'on avait toujours vu dans le danger, le 10 mai, tombait mortellement atteint, près des premières lignes.
Que de Morts, que de souffrances et combien d'héroïsme !
Quelques jours après, quand le régiment, quittant le secteur qu'il avait conquis et conservé, défila devant le colonel, les survivants, amaigris, hâves, couverts de terre, les vêtements en lambeaux, marchaient tout de même avec une fière allure ; ils avaient au coeur le sentiment du devoir accompli.
A peine reformé, le 97 remonta en ligne, le commandement espérant réussir plus complètement par la force, là où la surprise nous avait procuré, le 9 mai, un si brillant succès. Mais l'allemand était sur ses gardes, et à la puissance de notre artillerie, il opposa une contre-préparation au moins égal en intensité, supérieur certainement au point de vue des calibres employés. Les compagnies furent effroyablement écrasées dans les tranchées mêmes de départ, certaines perdirent plus de la moitié de leur effectif, mais tel était le sentiment du devoir, l'esprit d'abnégation de tous au 97, que les vagues d'assaut, si l'on peut appeler ainsi les groupes épars souvent sans chef, s'élancèrent le 16 juin à l'heure H dans la fournaise et dans la mort. Un cuisinier, Chapuis, voyant un de ces groupes, composée de bleuets de la classe 1915, hésiter, prit un fusil et s'élança à leur tête. Mais isolés, perdus dans la tourmente, renversés par les explosions et la fusillade, les assaillants sont cloués sur le sol. Le 1er bataillon est seul parvenu au cimetière de Souchez, il reste 3 jours et 3 nuits et l'abandonne enfin, n'ayant plus ni munitions, ni vivre, réduit à 3 officiers et 100 hommes environ.
La bataille est terminée. Le rêve de la percée s'est évanoui, de dures réalités lui succèdent. Durant tout l'été, le régiment demeure sur ce sol que les obus de 150 ou 210, les mines de toute nature ne cessent de bouleverser. Il fait une chaleur torride ; les pauvres morts dont le nombre s'accroît sans cesse, gisent sur le sol et dégagent une terrible odeur, des nuées de mouches obscurcissent l'air par instants, le ravitaillement est toujours difficile on est sans abris, on a soif et pourtant pas une plainte ; tous, chefs et soldats, accomplissent stoïquement leur devoir, forment, morts et vivants, barrière à l'envahisseur. Peu à peu cependant le secteur s'organise, les bataillons se relèvent méthodiquement, et à l'arrière, se préparent à de futurs assauts.
La nouvelle offensive est fixée au 25 septembre. Elle aura lieu en Champagne et en Artois : précédée d'une sérieuse préparation, elle doit rompre la ligne allemande, libérer le territoire.
Le 97 à cheval sur la route de Berthonval, à Arras, du Cabaret Rouge, poussera vers le nord-est, reprendra le cimetière, puis franchissant le grand ravin Nord-Sud entre Souchez et Carency enlèvera la grande tranchée de la cote 129. La préparation commence le 18 septembre, elle se poursuit non sans être considérablement gênée par l'artillerie allemande, et le 25 septembre, à midi, quand les unités déjà éprouvées dans les tranchées de départ, s'élancent avec le plus absolu dévouement, elles sont fauchées par la mitraille et les obus. Le 97 avance quand même ; les 3e et 4e bataillons (celui-ci nouvellement formé) en tête : le 3e à gauche arrive jusqu'à la tranchée allemande au cimetière, quelques hommes y pénètrent même, mais il ne peut aller plus loin; le 4e à droite enlève la première tranchée allemande, puis une autre, descend dans le ravin des Ecouloirs, monte à l'assaut de la grande tranchée. Il est seul, personne à droite, personne à gauche, mitraillé de partout il résiste et se cramponne au sol. Le lendemain, les 1er et 2e reprennent à nouveau la lutte: le cimetière tombe entre nos mains, et le 27 ils sont devant la grande tranchée d'où ils ne bougeront plus.
L'accalmie se fait peu à peu, la pluie tombe sans arrêt, ce sol argileux, desséché en été, devient une marée de boue dans laquelle on s'enlise, où le moindre pas exige un effort surhumain.
Soldats du 97, vous endurez tout en silence ; par vos souffrances votre abnégation, par votre héroïsme, vous concourez à la gloire et au salut de la France -- Vous méritez bien la citation qui vous est accordée.

Texte de la première citation
Régiment alpin, sous le commandement du lieutenant-colonel de Combarieu a fait continuellement preuve de solidité et de dévouement à toute épreuve. S'est dépensé sans compter, soit dans les débuts de la campagne, soit dans les attaques du 9 mai, du 16 juin, du 25 septembre et jours suivants, pour faire brèche dans les lignes ennemies : y a réussi pleinement en s'emparant de plusieurs tranchées puissamment défendues et en progressant sur un terrain difficile et minutieusement défendu par l'ennemi.
(ordre du général commandant la 10e armée N° 124 du 26 octobre 1915)


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Verdun - La Woëvre 1916

La pluie avait cessé en Artois et les Allemands avaient inauguré la guerre de mines; tantôt sur un point, tantôt sur un autre, l'explosion gigantesques se produisait, engloutissant des unités entières, creusant des entonnoirs énormes dont on se disputait les bords. Le 28 janvier, 3 fourneaux éclatent sous la 8e compagnie qui disparaît complètement : l'ennemi se lance à la faveur du désarroi, mais il est bientôt arrêté et s'il a pu pénétrer sur un point, il a trouvé devant lui l'adjudant Veillard qui, à la tête de sa section, cerné de toutes parts, tient tête quand même, refuse de se rendre et permet bientôt au soutien de rétablir la situation.
La lutte se prolonge, sournoise, quand vers le milieu de février la division est ramenée en arrière et après 18 mois de lutte sans arrêt s'apprête à goûter les douceurs du repos.
Bref séjour, car l'offensive allemande vient de se déclencher à Verdun et les divisions disponibles sont jetées l'une après l'autre dans la tourmente avec la consigne de tenir. Le 97 connaît cette consigne il n'y faillira pas.
Les autos l'emmènent de Montdidier à Blesme d'abord puis, au milieu de mars, aux abords de Verdun. Le 17, il montait en ligne entre les forts de Vaux et de Douaumont. Bien des rumeurs sont nées sur l'attaque adverse contre Verdun, les rumeurs colportées à l'arrière, grossies, dénaturées, mais dont le fondement immuable est l'écrasement de nos lignes par une formidable artillerie. Les soldats les ont entendus au cours de leur voyage, mais pas un ne faiblit ; ils montent en ligne avec une farouche résolution. Combien dure est cette montée ! : il fait nuit, on marche sur la route où passent au grand trot les caissons de ravitaillement et sur laquelle vient explosé, tant çi, tantôt là, un obus de gros calibre ; on s'engage dans les bois, zône de nos batteries constamment pilonnées ; les colonnes s'allongent, les guides se perdent, les hommes tombent et l'on avance quand même jusqu'à la tranchée, la tranchée unique, où chefs et soldats vont vivre les jours suivants en surveillant l'enemi, en attendant la mort. Pas un ne faiblit.
Et les jours se succèdent, chacun pareil au précédent. Des obus éclatent avant qu'on les ait entendu venir, d'autres s'annoncent par un bruissement sonore, 77, 105, 150, 280, pilonnent les tranchées, foudroient et renversent les occupants. Tout le monde se terre, et seul, les guetteurs surveillent impassiblement l'adversaire qui ne vient pas. -- Parfois durant le jour un homme bondit de trou en trou, c'est un agent de liaison qui porte un ordre; dans la nuit des ombres circulent, ce sont les brancardiers qui viennent relever les morts et les blessés, toujours nombreux, ou les hommes de soupes qui vont chercher le ravitaillement des sections. Les ombres se hâtent et disparaissent accomplissant stoïquement leur devoir malgré la mitraille et les explosions.
Les pertes sont partout de plus en plus fortes, la 7e compagnie a eu 80 tués en un seul jour et la tranchée se dégarnit peu à peu de ses défenseurs. Les survivants s'exposent davantage, le grenadier Villard, toujours en faction, tire inlassablement sur tout adversaire en vu : les mitrailleurs qui survivent dégagent et déplacent leurs pièces après chaque explosion. Mais la ligne devient plus mince, les hommes plus affaiblis et le 2 avril, le régiment relevé par une autre unité redescend à Verdun qu'il quitte bientôt définitivement.
En mai, recomplété par la classe 1916, le régiment remontait en ligne, en Woèvre, au nord de Flirey. Pendant 2 mois il tint les lisières, du bois de Mortmare, théâtre de rudes exploits en 1915, maintenant secteur calme, où le jour l'on circulait à l'aise mais où la nuit les mines, les torpilles et les obus tombaient en masse, au grand dommage des occupants.


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La Somme 1916

Août touche à sa fin : la bataille bat son plein dans la vallée de la Somme : français et anglais rivalisent d'ardeur et de courage pour enfoncer l'ennemi. La lutte a cessé du côté de Verdun et à notre tour nous avons repris l'offensive et l'initiative des opérations. Nous avons débuté par des succès superbes et les premières troupes engagées ont cueilli des moissons de lauriers ; maintenant la lutte est de plus en plus dure, les biens plus modiques, les pertes plus grandes. L'ennemi s'est ressaisi et à nos efforts il oppose une formidable résistance. N'importe!
Le commandement a décidé de ne pas lâcher prise et de frapper à coups redoublés, sans arrêt, jusqu'à ce que le mur, déjà disjoint et sans cesse étayé par l'adversaire, cède sous nos efforts. La lutte est dure : les troupes en ligne sont soumises à un bombardement incessant de jour et de nuit ; par instants les rafales s'abattent avec une intensité particulière : l'allemand, sur ses gardes, au moindre symptôme déclenche les plus violents tirs de barrage. Il n'y a pas d'abris, pas de tranchées, on organise les trous d'obus et cela est facile sur ce terrain plus criblé d'entonnoirs qu'une écumoire de trous ; les troupes en ligne sont mal ravitaillées, derrière elles s'étend le terrain chaotique, bouleversé et conquis par nous, aujourd'hui battu par l'artillerie allemande qui pilonne sans cesse les voies d'accès, les bas-fonds et tout ce qui peut échapper à sa vue, ou, à l'aide d'obus toxiques, rend tous ces points inaccessibles. Soldats! si l'ennemi réagit si furieusement, c'est qu'il redoute un désastre, on ne peut donc pas cesser de frapper. Il vous faut un coeur solide, une foi ardente dans la justice de votre cause, un amour profond votre pays, mais enfants de la Savoie et vous, venus de l'Auvergne, de la Bretagne, de la Gascogne et d'autre points, qui êtes maintenant regroupé sous le drapeau du 97e la Patrie peut compter sur vous, vous avez toutes les vertus de la race et vous affronter la mort sans faiblir.
Le régiment est entré en ligne, il est installé aux abords de Barleux, petit hameau en ruine que 2 fois déjà les coloniaux ont vainement tenté d'enlever. Il fait partie de la 10e armée qui, le 4 septembre à midi quinze, doit partir à l'attaque et border la Somme : placé à l'extrême gauche de la ligne, il a pour mission d'enlever Barleux, puis de converser au nord face à Biaches et à Péronne, de façon à fermer la tenaille sur les défenseurs allemands encore installés au sud de la rivière, dans la boucle. L'aube a été pluvieuse et chacun est transi de froid. N'importe ! à l'heure prescrite, les alpins sont debout et le soleil se lève sur le champ de bataille. À gauche, le 4e bataillon sélance, enlève la première tranchée allemande puis la seconde, mais il est alors pris violemment à partie sur sa gauche par les défenseurs plus au nord dont les feux d'enfilade lui causent de terribles pertes. Il leur fait face, et résiste à toutes les attaques et parvient à se maintenir.
Au centre, le 2e bataillon aborde la première tranchée allemande, l'enlève, dépasse une carrière profonde qu'il laisse aux nettoyeurs le soin de fouiller et poursuit sa marche. Mais les Allemands sortent en foule des abris profonds qu'ils ont creusés dans la carrière et dans lesquels ils ont été à l'abri durant les jours précédents : ils se jettent sur les assaillants, arrêtent la progression de ceux qui arrivent ou prennent à dos les 2 compagnies : 5e et 6e qui ont déjà passé. Celles-çi encerclées de toutes parts luttent désespérément, refusent de se rendre et quand l'ennemi les serre de trop près, elles les repoussent à la baïonnette.
Les hommes tombent : le sous-lieutenant Viollet sert lui-même la mitrailleuse dont tous les servants ont été tués. Le sergent Voisin, le grenadier Armand, luttent à coups de grenades non amorcées dont ils se servent comme des pierres : les munitions s'épuisent, le soir arrive ; alors le capitaine Baboulin se dresse, pousse un cri En avant ! à la baïonnette et les survivants, dans un dernier élan, parviennent à rejoindre le régiment.
À droite, le 3e bataillon, qui avait à parcourir un espace découvert, assez considérable, fut soumis, dès le départ à un violent tir de barrage et s'il put parvenir aux lisières du village, ce fut grâce à une énergie surhumaine des combattants.
L'attaque avait échoué, les pertes étaient des plus lourdes : au 3e bataillon, il restait 2 officiers, et 60 hommes. Le 159, à droite, n'avait pas mieux réussi.
Le régiment s'étala alors sur ce sol qu'il eut pour mission de défendre et s'étendit de Barleux jusqu'à la Maisonnette, ferme-château construit sur un petit mamelon dominant toute la boucle de la Somme et dont nous ne possédions qu'une partie.
L'existence y fut dure, le bombardement était incessant et les hommes constamment occupés à se dégager de leurs abris écrasés, à réparer les dégâts, relever les mourants, y vivaient dans l'attente de la mort. Ils demeuraient pourtant. Puis, un jour, le bombardement se fit plus intense, à la Maisonnette même il n'y a plus d'abri, il n'y a plus d'organisation, il n'y a plus de chef, il n'y a plus d'unité, il n'y a plus que quelques hommes épars qui luttent désespérément et succombent.
La Somme! Soldats du 97, vous n'y avez pas connu le triomphe, mais vous avez lutté vous avez souffert, vous êtes tombés pour une idée plus haute. D'autres cuielleront peut-être vos lauriers ; vous vous est donné sans compter et votre sacrifice, qui servira à la victoire future, ne doit pas être oublié, doit être cité en exemple à vos successeurs.
Octobre s'était écoulé, l'offensive de la Somme s'éteignait sans avoir procuré le résultat recherché, nous n'avions pu enfoncer l'ennemi : mais nos attaques n'avaient pas été vaines : l'allemand sortait terriblement épuiser de la lutte, moralement affaibli.
Deux tentatives faites à Verdun pour dégager la place réussirent superbement et nous rendirent, à peu près, toutes les positions que nous avions dû céder au cours des dures luttes durant les premiers mois de l'année, elles étaient la preuve que nos sacrifices n'avaient pas été Stériles.


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Nouvron - Vingré - Coucy 1916-1917

Le 97 retiré à la fin d'octobre, se rendit au camp de Coeuvres's et Vairsery, où pendant le mois de novembre, il pensa ses blessures, se remit à l'entraînement et à l'instruction. Le 4e bataillon fut alors définitivement dissous. Au commencement de décembre, transporté au nord de l'Aisne à l'ouest de Soissons, il s'établit dans le secteur de Nouvron - Vingré. L'hiver s'écoule tristement : il fait froid sur ce plateau dénudé, que balaie une âpre brise et, pour tromper l'attente, de part et d'autre, les adversaires se tâtent dans de continuels coups de main, précédés et suivis de copieux et meurtriers bombardements.
Les tranchées s'évasent, les boyaux se comblent, les fils de fer disparaissent au cours de ces tentatives, et sous le vent, la neige, la pluie ou le froid, on répare la tranchée, les boyaux, les abris ou les réseaux barbelés. Mais l'hiver s'achève et une rumeur circule : les Allemands n'ont pas voulu attendre l'offensive que nous devons déclencher dès le début du printemps. Les patrouilles se font plus nombreuses sur le front : le 17 mars à minuit, celles envoyées par le 3e bataillon ont pénétré dans les lignes adverses et les ont trouvées vides.
L'ordre est aussitôt donné, la poursuite générale commence.
Le régiment se dirige par Morsain, Vezaponain, arrive le 21 au soir, sur les bords de l'Ailette ; franchit le ruisseau sur quelques passerelles de fortune, construites à la hâte, occupe en dépit de quelques coups de feu le moulin de Nogent et la sucrerie des Michettes.
Il continue son mouvement, arrive devant le château de Coucy bâti sur un promontoire et dont le 1er et 2e bataillons s'emparent en le contournant par les ravins, l'un au nord, l'autre au sud, poussent encore sur le plateau vers le nord-est où ils se heurtent, le 28, aux ouvrages avancés de la nouvelle position allemande. Vouloir s'en emparer sans l'appui de l'artillerie serait folie et il faut attendre que celle-ci, retardée par tous les obstacles créés par les Allemands ou cours leur retraite, soit en mesure de nous aider. Le 12 avril les 1er et 3e bataillons enlèvent brillamment les positions, font de nombreux prisonniers et arrive à la fameuse ligne Hindenbourg.
Il n'y a plus qu'à s'organiser sur place et attendre que la grande offensive franco-anglaise annoncée depuis si longtemps se déclenche et procure des résultats. Chacun travaille avec ardeur, tranchées, boyaux, abris se creusent, s'approfondissent, les fils barbelés se tendent, et, vers le début de mai, le régiment relevé peut légué à son successeur un secteur presque complètement installé.
L'offensive, en effet, n'avait pas réussi. Le repli des Allemands au nord de l'Aisne avait rendu complètement inutileis les formidables préparatifs qui, nécessaires à une entreprise d'une pareille envergure, avaient été accumulé de ce côté au cours des mois précédents et leur avait permis de concentrer sur le front Soissons - Reims - Champagne une puissance de moyens supérieure à celle dont nous pouvions disposer.


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Le Chemin des Dames 1917

Bref séjour qui a laissé cependant un profond souvenir aux anciens du 97. Cramponnés aux abords d'une arrête sur laquelle court la fameuse route du Chemin des Dames et qu'occupe solidement l'adversaire, sans vue devant soi, des pentes fort raides derrière. Les soldats surveillent l'ennemi devenu très mordant depuis qu'il a brisé notre attaque. Ils sont au-dessus de Braye en Laonnois.
Le jour, la nuit, le bombardement ne cesse pas : parfois il redouble de violence, obus, mines écrasent un coin du secteur et, ahuris dans cette tourmente, les guetteurs voient soudain se dresser, des ombres ; ce sont les strosstrup. Des cris jaillissent, des coups de feu résonnent, des grenades éclatent ; l'on parvient à repousser l'assaillant. Ce sont de rudes soldats que les nôtres !
Le mois de juin se passe ainsi, au mois de juillet le régiment glisse plus à gauche. Entre le Panthéon et la Royère sur l'arête au-dessus de Pargny-Filain, l'ennemi s'avance et menace de rompre complètement notre ligne. Le 97 envoyé en renfort se déploie devant lui, bouscule les éléments avancés et arrête définitivement l'adversaire. Tout en maniant le fusil, les hommes reprirent des pioches, organisèrent la nouvelle position.
Au mois d'août, le 97 se rendaient dans la Haute-Alsace.
 

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L'Alsace 1917

Ce fut une période de trêve : installés à l'est de Dannemarie, dans un secteur peu mouvementé, les alpins tout en contemplant de leurs observatoires le champ de bataille de Flaxlanden et de Zillisheim, retrempaient leurs muscles dans cette saine atmosphère et s'entraînaient à de hardis coups de main. Le sergent Berthollet, à la tête de quelques hommes, se jetait la nuit sur une forte reconnaissance allemande, en mettait une grande partie en fuite et après une courte lutte forçait les autres à se rendre. L'été, l'automne passent ; l'hiver s'écoule, le régiment est prêt pour les dures luttes que l'on prévoit pour le printemps prochain.


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Plessier de Roye 1918

Durant l'hiver, la 77e division fut retirée du front d'Alsace et placée en arrière. Le commandement constituait des réserves, car la situation était grave et il fallait être prêt à faire face à bien des éventualités. Le traité de Brest - Litowski avait libéré de toute préoccupation sur le front russe les Allemands, qui, malgré les conditions du traité, ramenèrent toutes leurs forces vers l'ouest et acquirent ainsi une supériorité formidable en hommes et en matériel. Le 21 mars, ils se jetaient sur le front anglais, enfonçaient l'armée du général Cough, la refoulaient vers Montidier, tandis que de part et d'autres poussaient avec vigueur pour élargir la poche dans laquelle ils étaient engagés. Les divisions françaises disponibles, furent jetées en avant avec comme mission de boucher les trous qui se creusaient sans cesse dans la ligne et d'arrêter à tout prix l'avance de l'ennemi. Transportées en camion, avec un minimum de vivre, de munitions, elles se portaient immédiatement dans les intervalles, organisaient sommairement une position.
La 77 est de ce nombre. Le 97, embarqué le 24, arrive le 25, de bonne heure à Cany sur Matz et se porte à l'est du Plémont au secours d'une division engagée, puis revient s'installer entre Canny et le Plessier de Roye.
Le 27, Canny, est submergé, mais le bataillon qui l'occupe se replie sans cesser de combattre et le soir, les 2 bataillons en ligne se maintenaient sur la route Canny - Plessier.
Le 28, le 97 s'installait de la façon suivante : 2 à droite en première ligne en avant du Plessier devant Lassigny ; 3 à gauche ; 1 en réserve. On organisait sommairement la position, mais le front était considérable et les unités fort étirées. Le 29 se passa sans incident.
Le 30, le bombardement adverse commença de bonne heur et alla en s'accentuant, puis, vers 7 heures parurent les vagues allemandes suivies de masses énormes, dont l'effort se porta surtout sur le 2e bataillon. Chacun se réjouit d'abord, mitrailleurs, fusiliers mitrailleurs, fusils entrent en action et prennent plaisir, malgré la mitraille, à voir tomber l'adversaire sous leurs coups.
Les Allemands comblaient les vident et poussent quand même : de petits groupes d'entre eux se faufilent de couvert en couvert et arrivent dans le Plessier de Roye ; d'autres se glissent entre le 2e bataillon et le 159 à notre droite. Vers 8 h 30, le 2e bataillon a ses premières lignes encerclées et en partie submergées ; puis seuls les débris de la 7 groupés autour de leur chef, le capitaine Desrieux, luttent encore désespérément, cernés de toutes parts. L'ennemi a pu pénétrer dans le parc du château. La dernière compagnie du 2e bataillon s'élance au secours des 2 autres, elle charge avec le plus admirable élan, vers son capitaine, le lieutenant et les 3 quarts de son effectif sans pouvoir arriver à un résultat.
L'ennemi maintenu à droite du Plessier par le 159 dont la gauche s'est un peu repliée ; à gauche par le 3e bataillon, pousse avec la plus sauvage énergie dans le parc, arrive au PC du colonel que défendent avec non moins d'opiniâtreté les pionniers sous la conduite du lieutenant Kossowski et tous les agents de liaison. La plupart de ces braves succombent à la tâche, le colonel Tissier lui-même tombe mortellement frappé. Mais cette âpre lutte se prolonge et donne le temps à quelques réserves d'arriver. À midi, la 7 dont les pertes ont été considérables et qui a épuisé toutes ses munitions à sombrer dans la tourmente : le 2e bataillon n'existe plus, le parc du Plessier est entre les mains de l'ennemi.
Mais ce dernier épuisé par une pareille lutte ne peut poursuivre son avantage, il est emmuré dans le parc. Les compagnies du 1er bataillon, quelques autres du 226 venues en renfort l'empêche de déboucher.
Le soir même, après une courte préparation, ces mêmes éléments se lançaient en avant et reprenaient tout le terrain perdu dans la matinée.
Plessier, le village, le château, le parc sont de nouveau à nous, 850 prisonniers restent entre nos mains.
La résistance désespérée des uns a permis le succès des autres et l'Allemand découragé renonce à enfoncer la ligne de ce côté. Quelques jours après le général Humbert disait de la 77e division je vous avais donné à garder un des piliers de la porte qui s'ouvrait sur le coeur de la France, cette mission vous l'avez magnifiquement remplie.
La division fut retirée du front dès le commencement d'avril : elle remonta en ligne pendant quelques jours puis vers la fin du mois fut définitivement rappelé à l'arrière ; elle était destinée, sous les ordres de son nouveau chef, le général Serrigny, à faire partie des réserves que le commandement cherchait constamment à reconstituer.

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Les bois de Reims

Le régiment transporté dès le commencement d'avril dans les Vosges s'établit, sous les ordres de son nouveau chef le lieutenant-colonel Tron de Bouchony, sur la crête des Vosges, du ballon de Guebviller à l'Hartmansviller dominant cette pleine d'Alsace, encore pour quelques mois aux mains de l'ennemi. Des renforts vinrent compléter les effectifs dans ce secteur relativement calme, l'amalgame se fit rapidement et après quelques jours d'entraînement, passé l'Oise vers la fin de juin, le régiment fut une unité animé du plus bel esprit de vaillance et de dévouement.
Le 15 juillet au matin, le 97 se trouvait en réserve au sud de la Marne et se portait les jours suivants vers différents points menacés ; le 19, à la pointe du jour, il se lançait à l'attaque avec un allant merveilleux ; sa mission était de repousser sur la rive nord, les fractions ennemies qui, ayant franchi la rivière, luttaient depuis 3 jours avec une énergie farouche pour se maintenir au sud.
L'adversaire s'étant replié dans la nuit, la progression s'effectuea malgré les rafales violentes de l'artillerie adverse avec autant de calme que de vigueur. Le soir, la Marne était atteinte entre Troissy et Mareuil le Port et solidement tenue : la manoeuvre s'était déroulée sous la mitraille comme sur un terrain d'exercices.
Transporté en auto, le régiment se trouvait réunit le 22 dans le bois de la montagne de Reims et recevait l'ordre d'attaquer le lendemain. Il s'agissait d'enlever la coupe boisée séparant la vallée de l'Avre et du Noron, de forcer l'ennemi par cette avance à évacué l'une et l'autre. Le 97 avait devant lui l'arête même ; c'était la partie la plus forte, la mieux organisée ; c'était la tâche la plus ardue, elle fut la plus brillamment accomplie.
Le 23, vers 11 heures, après une courte préparation les 1er et 2e bataillons portés au cours de la nuit sur la ligne de départ, s'élancent avec une égale ardeur.
L'artillerie ennemie fait rage. Les mitrailleuses allemandes habilement dissimulées dans tous les coins, crépitent sans arrêt, le terrain est difficile, le taillis rendu plus impraticable encore par la chute des arbres que les obus ont fauchés : la progression est lente, mais elle est continue en dépit de tous les obstacles et de toutes les résistances qu'il faut abattre une à une. Le 1er bataillon à droite arrive le premier à l'objectif assigné ; la lisière nord du bois du parc de Cemmet - Reuil ; 2 heures d'efforts lui ont été nécessaires.
Le 2e à gauche, se heurte à une résistance plus farouche encore ; il lutte pendant 6 heures avec une ténacité, un courage et une science admirables, et, à 17 heures, parvient lui aussi à son objectif, la lisière du parc.
Des canons, de nombreuses mitrailleuses, des prisonniers, une partie de l'arrête conquise, tel était le résultat de cette journée.
Le 3e bataillon, le soir même, se portait en avant pour continuer la lutte et arracher à l'ennemi le bois des dix Hommées. Celui-ci est séparé des bois de Commet - Rueil par une large clairière qu'il faut franchir sous les feux d'un ennemi qui se rend compte de l'importance de la position et a reçu l'ordre de nous arrêter à tout prix. Le 24, entraîné par son chef, le commandant Bertin, le 3e bataillon cherche à aborder le bois, mais, en flèche et battu de toutes parts, il ne peut y arriver. Le 25, il reprend la lutte, s'acharne malgré les pertes, pénètre enfin dans la position ennemie ; en dépit des fatigues, poursuit son avantage, enlève morceau par morceau et le 26 au soir est maître de la situation.
De tous côtés : fusils, mitrailleuses, cadavres allemands jonchent le sol et, résultat plus appréciable encore, la division britannique à gauche progresse, grâce à notre avance dans la vallée de l'Arde et s'établit à notre hauteur.
Durant ces 4 jours de combat nombreux furent les actes d'héroïsme. Le sous-lieutenant Ruat c'est jeté au devant de mitrailleuses et a entraîné ses hommes avec lui. Le lieutenant Rivoire a bondi sur une autre pièce, a abattu 2 servants de sa main et fait prisonnier le 3e. Le soldat Coutarel, agent de liaison de la 1ère compagnie, se trouve tout à coup face à face avec 3 ennemis ; il en tue 1 et fait prisonnier les 2 autres ; le brancardier Jacob, de la 2e compagnie, spontanément, sous le feu d'une mitrailleuse, va relever le sous-lieutenant Bon, grièvement blessé, il est lui-même mortellement atteint quelques instants après, le soldat Noiray, de la 5e compagnie, s'empare de haute lutte d'une mitrailleuse légère, la retourne aussitôt vers l'ennemi qui contre-attaque. Le sergent Moynier, de la 6e compagnie, avec une poignée d'hommes, fait prisonniers 23 Allemands dont un officier, 36 mitrailleuses et 2 minenwerfer ; le sergent fourrier Seguret, de la 7e compagnie, s'offre spontanément pour faire une patrouille, prend un FM, tire en marchant à l'ennemi, éteint ainsi le feu d'une mitrailleuse et tombe mortellement blessé ; le soldat Carpentras, de la 10e compagnie, patrouilleur de tête, découvrant soudain, à quelques mètres, une mitrailleuse légère crie de toutes ses forces : Attention ! voilà les Boches et tombe mortellement frapper ; le sous-lieutenant Mouthon, sérieusement blessé le 25, refuse de se laisser évacuer, il est mortellement atteint, le 26 à la tête de sa section ; le sous-lieutenant Carras, commandant le peloton de 37, avec ses valeureux servants bientôt réduit de moitié, contribue puissamment à la réduction de nombreux nids de résistance que les bataillons trouvent sur leur route, blessé très sérieusement le 29, il ne voudra abandonner la lutte que 36 heures plus tard, sa tâche glorieuse accomplie.
La magnifique vaillance du 97 à déjà assuré de gros avantages, l'ennemi faiblit, il faut lui arracher le dernier morceau de l'arète boisée et c'est au régiment que reviennent encore la tâche et l'honneur. La fatigue est extrême, le ravitaillement difficile, le bombardement, par toxiques et explosifs, permanent depuis 6 jours. N'importe, le régiment s'y dévoura tout entier.
Le 29, dans la matinée, par une savante manoeuvre, le 2e bataillon se place pour partir à l'attaque ; il a devant lui le bois des Houleux qu'il doit enlever. Son flanc sera couvert à droite par le 1er bataillon qui doit aussi progresser ; à gauche il se couvrira lui-même.
Le 1er bataillon, fortement éprouvé par les gaz, ayant a traversé un terrain très en vue et fortement battu, ne peut arriver à franchir le barrage fait devant lui par les Allemands, plus tard, il se portera tout de même en avant et les soldats Deloir, Maron, Combet, et Nault de la 3e compagnie, iront même jusqu'à l'objectif d'où ils ramenèrent 5 prisonniers.
Le 2e bataillon triomphe de tous les obstacles, enlève successivement tous les centres de résistance, et après 5 heures d'une lutte ou chef et soldats rivalisent de courage et du dévouement, s'établit sur la position assignée ; la 5, en tête, sous les ordres du lieutenant Rousset, a été d'une particulière vaillance. Mais ce bataillon en avancée, est le lendemain de bonne heure, violemment assailli par des forces très supérieures. Les hommes ont subi un bombardement terrible, ils sont épuisés et cependant ils ne veulent pas lâcher ce qu'ils ont si péniblement conquis. La lutte se prolonge et tous se dévouent jusqu'à la mort pour arrêter l'adversaire. Le lieutenant Rousset est partout jusqu'à ce qu'il soit atteint, le sous-lieutenant Beck tombe le dernier sur sa pièce, tué à bout portant après tous les servants ; le sous-lieutenant Gely est frappé fusil en main. On se replie un moment sans cesser de combattre et l'on fait une hécatombe parmi les rangs de l'assaillant puis la ligne s'arrête et le chef de bataillon le commandant Messines, téléphone au milieu de la bataille : l'ennemi tape rudemment, la 5e a perdu tous ses officiers, les pertes sont lourdes, mais je tiendrai quand même. Le bataillon, le soir même, entraîné par son chef - voir au dos - repartait en avant, reprenait à nouveau toute la positions et s'y installait définitivement.
Deux jours après, le régiment était relevé : il laissait une tâche facile à ses successeurs qui ne trouveront plus devant eux qu'un ennemi démoralisé et déjà résolu à la retraite.

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Les Flandres

L'offensive se déclenchait le 14 octobre.
La 77e DI, toujours sous les ordres du général Serrigny, enlevait les premières positions ennemies, puis cherchait à s'emparer d'Hooglede, localité bâtie sur une croupe et énergiquement défendue.
Le 14e groupe de chasseurs progresse au nord, le 159 au sud quoique avec peine, mais une partie de la bourgade reste aux mains de ses défenseurs, et les assaillants se sont fortement séparés. Le 97 suivait en réserve, quand il reçut l'ordre de rétablir la liaison et de faire tomber la position. Le 3e bataillon, sous les ordres du commandant Bertin contourne habilement Hooglede, tombe dans le flanc des défenseurs et rétablit la situation.
L'attaque peut progresser, mais elle est bientôt arrêtée de nouveau : l'ennemi dès le 1er jour, emploie la tactique dont il ne cessera d'user dans sa retraite. Il se replie, couvert par de fortes arrière-gardes dotées de mitrailleuses, et qui, appuyées par une puissante artillerie ont ordre d'empêcher à tout prix notre progression. Il lui importe en effet que nous ne puissions arriver à la Lys avant que des renforts ne soient venus s'y installer et nous en interdire le passage. Chaque jour les bataillons, au cours de cette poursuite implacable, se heurteront à de nouvelles résistances, qu'il faudra faire tomber une à une, chaque jour, ce seront de nouveaux et rudes efforts et aussi de nouveaux succès.
Dès le 15, le 97, en première ligne enlève Gitsberg qui n'a pu être abordé la veille, puis la route Gitsberg - Thourot.
La voie ferrée à peu de distance en arrière est une nouvelle ligne de défense qu'il faut rompre, puis la station de Gits est remportée à son tour à la tombée de la nuit.
Des prisonniers, des canons, des mitrailleuses, des dépôts considérables de matériels sont le résultat des luttes de cette journée. Le 16, à l'aube, la poursuite reprend ; de nouveaux obstacles se dressent : les mitrailleuses ennemies installées sur les hauteurs de Colscamps à la côte 48, à la ferme Delodder, crépitent ; l'artillerie adverse tonne, il faut enlever chacun des points d'appui : le commandant Bertin, toujours en tête pour diriger ses unités, tombe gravement atteint ; mais la manoeuvre unie au courage permet de triompher de toutes les résistances. Chacune des positions est tour à tour enfoncée, et de nombreux prisonniers restent entre les mains de l'assaillant.
Le 17, nouveaux combats, nouveaux succès ; la route Wynghene - Hiest sur laquelle l'ennemi résiste est enlevée à midi, et, à 15 heures, le village d'Hooithoeck est emporté après une très vive lutte. Le lendemain de bonne heure, les Allemands tentèrent par une puissante contre-attaque de nous reprendre ce hameau. Repoussés avec pertes, ils se décident à battre en retraite et s'établissent à peu de distance. Le chef de corps, disposant de 2 groupes de 75 fait concentrer successivement le tir sur les points occupés et lancent tour à tour à l'assaut les 1er et 3e bataillons. Après 4 heures de lutte, la position est à nous, nombre prisonniers sont entre nos mains, après une lutte sévère au cours de laquelle les canonniers d'accompagnement, entraînés par leur chef, lieutenant Carraz, rivalisèrent de vaillance. À 15 h 30, le 1er bataillon à son tour attaque des nids de résistance et soutenu par les 75 arrive à s'emparer d'un certain nombre d'entre eux.
Le 23, tandis que le 14e groupe de chasseurs franchissait la Lys à la droite du régiment et après une lutte très vive, installait une tête de pont sur la rive droite, les dernières résistances étaient renversées et le 97 s'installait sur les bords mêmes de la rivière, où il demeurait en surveillance, observant le village de Deynz, but final est essentiel assigné à ces efforts.
L'ennemi battu presque journellement avait reculé de plus de 50 km, laissant entre nos mains des canons, des mitrailleuses, un matériel considérable et de très nombreux prisonniers.
Le 97 avait lutté sans arrêt pendant 15 jours et les compagnies réduites à 40 ou 50 fusils avaient poursuivi jusqu'au bout leur tâche malgré la fatigue, malgré la faim, malgré les obstacles, donnant l'exemple du dévouement le plus héroïque. Que d'exploits devraient être signalés dans ces asauts de vaillance !
Le sous-lieutenant Carraz s'élançant avec ses canonniers à tous les endroits difficiles et bravant constamment le danger pour aider les camarades avec ses Stokes ou ses 37. Le sergent fourrier Demarchi agent de liaison de la 3e compagnie, s'élançant à la tête de quelques hommes au devant d'une contre-attaque, aux cris de Baïonnette au canon ! En avant les enfants. Le sergent Ugnon, aidés des soldats Janin et Placent et de quelques camarades, n'hésitent pas à se lancer sur une ferme des plus fortement tenues, dont à force d'audace qu'ils parvenaient à se rendre maître. Le caporal Aubry, sommé de se rendre par des adversaires qui le surprennent, se jette, sur eux et les force à se rendre. Combien d'autres encore dont les actions sont restées ignorées, ont rivalisé de bravoure et ont assuré le succès et la gloire de leur régiment.
Le 97 relevé le 25, revenait reprendre sa place de combat entre la Lys et l'Escaut et participait à une attaque générale en direction de Gand. À l'heure prescrite, le 3e bataillon sélance, la 10e compagnie magnifiquement entraînée par son chef le capitaine Martin en tête, atteint les objectifs assignés à 2 km environ de la base de départ et fait de nombreux prisonniers. Isolé en avant, car les unités voisines ne l'ont pas suivi, et assailli de toutes parts, il résiste avec la dernière énergie, se replient légèrement sur une position meilleure et soutenue par des éléments du 2e bataillon, repousse victorieusement toutes les attaques de l'ennemi.
Dans la journée du lendemain, l'attaque générale reprend. Le 97, continue la lutte, et l'ennemi, découragé par ces insuccès de la veille, n'oppose plus la même résistance ; il cède sous les coups et la manoeuvre, a raison de tous les obstacles. Dans la journée, la progression atteint 5 km en profondeur.
Le 2 novembre, le régiment poussait encore l'adversaire, définitivement en retraite et s'établissait le soir aux avant-postes, il devait dans la journée du lendemain être dépassé par l'armée belge qui en marche de la Lys à l'Escaut, se dirigeait de l'est à l'ouest au sud de Gand.
Il était relevé peu après et revenait vers Arserle et Caeneghen où le surprit l'armistice.
Cette dernière période quoique fort courte avait été dure.
3 officiers, 2 capitaines, 1 sous-lieutenant, 3 sous-officiers, 20 caporaux ou soldats étaient tombés au champ d'honneur, 69 étaient blessés plus ou moins grièvement. La comparaison de ces chiffres avec le petit nombre, et la faiblesse numérique des unités engagées (50 fusils environ par compagnie) indique suffisamment l'âpreté de la lutte, et l'on ne saurait trop admirer la vaillance de ces braves qui, depuis le 15 octobre, n'avaient cessé de marcher et de se battre dans les conditions les plus difficiles. Aussi une nouvelle citation était-elle accordée au régiment, nouveau témoignage de la belle conduite de tous, officiers et soldats.

Régiment d'élite, sous les ordres du lieutenant colonel Tron de Bouchony, a affirmé à nouveau sa réputation dans la bataille des Flandres.
Du 14 au 19 octobre 1918, il bouscule l'ennemi, le fait reculer de 7 km, lui arrache, dans une lutte sévère, des hauteurs énergiquement tenues, le poursuit et enlève à des réserves fraîches, un village défendu désespérément.
Malgré des pertes sérieuses et de vigoureuses contre-attaques, il s'empare, le 1er novembre, des positions de la Garde Prussienne et progresse de 10 km au cours de 2 journées de durs combats.
Du 14 octobre au 2 novembre, a capturé 500 prisonniers, 5 pièces de canon, un matériel considérable.

(ordre de la 6e armée n° 660 du 27 novembre 1920).


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